Je n'avais pas forcément prévu de parler si tôt de Fleetwood Mac dans la mesure où j'avais déjà un peu abordé le sujet il y a peu. Mais voilà, en allant consulter la liste des titres les plus populaires en ce moment sur les blogs, je tombe sur un remix de Dreams par Gigamesh (qu'on peut aller télécharger ici)... à la première place ! Je lui préfère un autre remix sur lequel je suis tombé il y a quelques semaines à peine, celui de Flight Facilities (à télécharger ici)
Ce qui étonne, dans un remix comme dans l'autre, c'est que ça n'a pas tant bougé que ça par rapport à l'original : un beat plus appuyé là, une version plus délayée ici, histoire de prolonger le plaisir, mais, là comme ici, on a laissé intégralement la partie de chant de Stevie Nicks et la majorité de l'instrumentation d'époque. Ce qui est étonnant, donc, c'est comme il se dégage une impression de nowness (c'est dingue ce que je speak anglais ces temps-ci) de cette chanson, ou si vous préférez comme cette chanson s'imprime parfaitement dans notre quotidien musical alors qu'elle date de 1977. On pourra m'objecter que c'est le cas de la plupart des classiques, ces "golds" comme on les nomme en radio. Sauf que non : là où un gold respire le souvenir (et sera d'ailleurs introduit en radio par le sempiternel : "Souvenez-vous, c'était en 1977" ou n'importe quelle autre date), cette chanson semble à peine débarquée de chez le disquaire. Sans doute parce qu'il règne déjà dans l'air comme un parfum de Fleetwood Mac. Personnellement ce parfum m'est monté aux narines (enfin aux oreilles, mais bon, vous m'aurez compris), il y a quelques mois via l'irruption de Niki & The Dove dans ma discothèque. Niki & The Dove est un groupe Suédois (Ah! La Suède !) qui, s'il verse plutôt du côté de l'electro côté arrangements, n'est pas sans rappeler la Stevie Nicks de Fleetwood Mac via sa chanteuse Malin Dahlström qui, sans tout à fait lui ressembler, présente toutefois avec elle une étonnante familiarité vocale, physique et même vestimentaire (tendance hippie) dans le clip de DJ ease my mind.
Je conseille d'ailleurs vivement l'écoute (et plus si affinités) de l'album de Niki & The Dove. Pour en revenir à Fleetwood Mac, l'un des signes les plus tengents de leur "retour à l'actualité", c'est bien entendu la sortie cet été de Just tell me that you want me, tribute album où un casting impeccable de la jeune scène actuelle (bon d'accord, y a aussi Marianne Faithfull) rend hommage à leurs glorieux aînés : The Kills, Antony, Tame Impala, MGMT, Lykke Li, ma préférence sur cet album très dispensable allant tout de même à Washed Out (mais bon, en même temps, qu'est-ce que j'aime pas de Washed Out ?) pour sa reprise de Straight back.
Je ne pense pas que le fait de reprendre cette chanson de l'album Mirage en 1982 tienne du hasard. Si Fleetwood Mac a commencé sa carrière en 1967, le groupe ne m'intéresse qu'entre la période comprise entre leurs deux plus gros succès : Rumours, en 1977, et Tango in the night, en 1987. Soit à l'arrivée de Lindsey Buckingham et Stevie Nicks dans le groupe et jusqu'au (premier) départ de Lindsey Buckingham. Bon, c'est pas tout à fait vrai puisque les deux (alors) tourtereaux sont arrivés en 1975 mais l'album sorti cette année-là sonne vraiment trop encore comme un brouillon de ce qu'allait être Rumours deux ans plus tard. Avec Rumours, Fleetwood Mac entamait sa période de grâce où mélodies fluides et arrangements précieux allaient accoucher d'une flopée de très bons albums. Il est toutefois arrivé un truc à Fleetwood Mac en 1977 qu'on ne leur a sans doute pas pardonné, du moins jusqu'à maintenant : le succès. Mais alors, l'ENORME succès puisqu'ils en ont quand même vendu plus de 40 millions à travers le monde, ce qui, finalement, n'est pas très loin du Thriller de Michael Jackson. Or, à partir de là, on ne les a pas, à mon sens, considérés comme un groupe sérieux ; c'était un groupe qui faisait des tubes à la radio, point. On a totalement sous estimé leur génie parce que le succès, c'est suspect. En cela, on pourrait voir en eux le pendant américain aux Suédois Abba. La comparaison, d'ailleurs, ne s'arrête pas là. Il y a(vait) dans les deux groupes deux couples : Anna-Fryd et Benny ainsi que Björn et Agnetha pour ABBA (d'où le nom, pour ceux qui ne le sauraient pas encore - prends nous pour des cons, penseront les autres), et Buckingham & Nicks ainsi que Christine et John McVie pour Fleetwood Mac. C'est à la fin des années 70 (et précisément au moment d'enregistrer l'album Rumours pour Fleetwood Mac) que les couples, dans les deux formations, se sont séparés. Et c'est aussi alors qu'ils se sont mis à produire leur meilleure musique. Avec une bonne dose de cruauté des uns envers les autres. Par exemple, quand Agnetha chante The winner takes it all, elle chante les mots que lui fait dire son ex sur leur séparation. Il n'empêche que Knowing me, knowing you en pleine période prédivorce (et qui annonce clairement la couleur si on ne se laisse pas seulement aller à taper du pied pour écouter, deux secondes, les paroles) est l'une des meilleures chansons de leur répertoire.
Et tout comme Fleetwood Mac, Abba eut droit il y a quelques années à une réévaluation sur laquelle je m'étais déjà étendu. Revenons à Fleetwood Mac et maintenant réécoutons l'entrainant Go your own way ; oui, on peut se contenter de secouer la tête et faire semblant de jouer de la guitare électrique mais on peut aussi se pencher deux secondes sur le texte et voir que Buckingham y parle clairement de sa séparation d'avec Nicks, et c'est sans doute toute sa colère par rapport à la situation qu'il fait passer dans ses guitares rageuses.
Même si les séparations peuvent bien se passer, je ne pense pas que ce fut le cas avec celles évoquées ici. M'est avis qu'ils ont écrit ça en mettant une bonne part de leur amertume dans leurs compositions car ils se disaient que ce serait sans doute, aussi, la fin de l'aventure ensemble, leur dernier disque. Et c'est là où ils se sont fait totalement piégés par le public qui a totalement adhéré à leur musique à ce moment précis. Sans doute parce que ça faisait résonner des sentiments personnels chez tout un chacun. Sans doute aussi (car j'ai souvent dit, et je le répèterais, qu'on n'écoute pas "vraiment" les paroles) parce qu'ils ne s'étaient jamais autant livrés que dans ces moments là. D'une parfaite et terriblement lucide honnêteté. Evidemment ce doit être par la suite très difficile de réinterpréter ces chansons jusqu'à la nausée, un peu comme on rouvrirait tous les jours des plaies qui ne demandaient qu'à cicatriser. Le fait même qu'Agnetha, malgré les ponts d'or qu'on lui a fait, ait toujours refusé de remonter (sur scène avec) Abba tend à le prouver.
Contrairement à Abba, que j'ai aimé dès que j'ai commencé à m'intéresser à la musique, mon amour de Fleetwood Mac n'est, lui, venu que sur le tard et plus précisément en 1987 avec, donc, l'album Tango in the night où Lindsey Buckingham, qui semble vraiment livrer toute sa souffrance quand il chante, m'a totalement cueilli sur Big love et dont on comprend à quel point cette chanson lui appartient quand on regarde son interprétation en live par un Fleetwood Mac réduit... au seul Lindsey Buckingham.
Mais à force de parler de lui, on pourrait penser que moi même je réduis le groupe à son seul guitariste. Or, ce qui fait la force de Fleetwood Mac, c'est l'ensemble de ses différentes personnalités. Stevie Nicks a, elle aussi, écrit de très belles chansons. Enfin, une très belle chanson, Dreams, qu'elle a ensuite décliné (mais avec talent) de plein de manière différentes que ce soit en Sara sur l'album Tusk, Gipsy sur Mirage ou Seven wonders sur Tango in the night. Et c'est tout de même Christine McVie qui signa une grande majorité de leurs succès. Mais c'est quand le groupe, et plus particulièrement ces trois là, se liaient pour ne faire qu'un qu'évidemment, ils étaient les plus forts. Et c'est pourquoi, même s'ils se sont depuis reformés, je n'ai pas trouvé la même alchimie dans ce qui suivit puisque (jusque là) ces trois là ne se sont jamais retrouvés ensemble autrement qu'en live, une partie de l'équation venant toujours à manquer quand ils enregistrent en studio. Il n'y a pas que l'alliance des claviers de McVie aux guitares de Buckingham, il y a aussi ce brio dans les voix qui est à son sommet sur Little lies. Quand Christine McVie chante au refrain "Tell me lies / Tell me sweet little lies", que Stevie Nicks enchaîne sur "Tell me lies", et que Buckingham embraye sur "Tell me / Tell me lies", je n'ai qu'une envie : qu'ils continuent de laver leur linge sale en public si ça doit donner ce résultat.
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