lundi 12 novembre 2012

Joni be good

Arrivé à ce stade de mon blog, j'ai l'impression que plus d'un arrivera en cours de route et qu'au mieux, on ne pourra découvrir ce blog qu'à l'envers. C'est ce qui m'est arrivé avec Joni Mitchell à laquelle m'a fait penser un article de Pitchfork à l'occasion de la réédition de ses premiers albums, de 1968 à 1979. Le journaliste y conclue son papier en disant que même si Joni Mitchell a continué de sortir des albums par la suite, ceux des années 80 étaient sentencieux et s'acoquinaient maladroitement avec la technologie. Sans compter la tessiture de sa voix ravagée par des années de cigarettes. Si j'ai un peu accroché sur Joni Mitchell via l'album Dog Eat Dog (et particulièrement la chanson éponyme) en 1985, c'est l'album Chalk Mark in a Rain Storm en 1988 qui m'a cueilli : je l'avais désigné meilleur album de cette année-là.



Sur The beat of black wings, il y a Benjamin Orr, un des chanteurs des Cars, aux choeurs. Mais l'album concentrait une flopée de guest stars impressionnante : Peter Gabriel, Tom Petty, Billy Idol, Wendy & Lisa, Don Henley, Willie Nelson et autres musiciens très en vue - du moins à l'époque - comme Thomas Dolby ou Manu Katché. En général, les albums qui comptent pléthore d'invités finissent par ressembler au mieux à une collection de chansons partant dans tous les sens et, au pire, soit la majorité des cas, à n'importe quoi. Mais Chalk Mark in a Rain Storm forme encore aujourd'hui un ensemble cohérent marqué surtout par le timbre de Joni Mitchell. On y sentait déjà le souffle de maintes cigarettes, ce léger voile sur la voix qui en fait toute sa beauté et qui me donnerait presque envie de reprendre la cigarette si j'étais chanteur. Car, je ne connaissais alors pas la voix originelle de Joni Mitchell, rossignol hippie montant comme elle le voulait dans les aigüs. Cette voix, je l'ai donc découvert rétrospectivement en allant fouiller dans les douze albums qui avaient précédé Chalk Mark. Et j'y ai découvert de très belles choses comme Marcie sur son premier album en 1968.



Joni Mitchell ne fait justement pas trop la démonstration de sa voix ici et explore plus les graves que les aigüs. Et c'est précisément ces graves que je préfère dans cette voix. C'est aussi pourquoi j'aime beaucoup la Joni Mitchell des années 80 et suivantes qui reste plus dans ce registre. A la manière d'une Kate Bush, elle a fort heureusement perdu ses sommets presque hystériques pour gagner de plus calmes et sereines vallées. Mais il n'y a pas que cela. Je ne vais pas me pencher sur ses textes, trouvés sentencieux vu que je ne me suis jamais vraiment intéressé au sens des paroles qu'elle chante. En revanche c'est grace à ces rencontres jugées balourdes avec la technologie que Joni Mitchell a trouvé une place au chaud dans ma discothèque. Surtout ils ont accompagnés une poignée d'albums, qui, même si ce n'est pas l'avis du plus grand nombre ou, du moins, de la critique, font partie de ses albums que j'écoute avec le plus de plaisir. Après Chalk mark, ce fut le parfait Night ride home, en 91



Et, finalement sur la même lancée, Turbulent Indigo qui la fit revenir au premier plan critique et commercial (l'album gagnant le Grammy du meilleur album pop en 94), puis Taming the tiger en 1998.



Deux ans plus tard, Joni Mitchell, avec l'album Both sides now, changeait de registre, de période, de siècle via l'album Both sides now. Sa voix faisait toujours des merveilles mais cette fois entourée d'un grand orchestre pour des reprises de jazz. Et c'est précisément cet album que notre critique évoque comme le seul digne d'intérêt après 1979. J'aime bien cet album et encore plus Travelogue, où deux ans plus tard, elle explorait sur le même format du grand orchestre l'ensemble de sa carrière. Mais le plaisir qu'il me procure n'est rien comparé à celui des albums de la dame entre 1985 et 1998. Je vois très bien pourquoi le critique (j'ai été poli jusqu'à présent, mais j'aurais pu écrire "ce connard" depuis un bail) range le tout sous la formule : "awkward embraces of technology" (j't'en foutrais des awkward, moi) : c'est le son des claviers, ces nappes de synthé qui accompagnent la guitare très réverbérée. Des trucs qui vieillissent mal. C'est le problème de tout ce qui est technologique : il y a toujours des avancées en la matière qui relèguent ce qui a été fait avant au rang de vieilleries. Du coup, les instruments traditionnels ont l'avantage de la constance : une guitare acoustique sonnera toujours comme une guitare acoustique. Ce son ne prendra pas de ride tandis que s'imprime sur celui des synthés la marque de son époque (ou l'époque de ses marques de synthés). Les machines permettent une infinité de sons tandis que notre oreille n'arrête sa préfénce que sur quelques unes à la fois selon les périodes. Ce n'est pas donc pas que ça vieillit mal mais bien plus que cela correspond à un temps qui n'est plus le présent si vous voyez ce que je veux dire. Mais qui peut le redevenir au fur et à mesure que ces sons passeront du statut de ringards à ceux de vintage. C'est le cas aujourd'hui du son des synthés du début des années 80 qu'on essaie de retrouver ; qui dit que demain, quelque part, on ne cherchera pas à retrouver le son qu'avait, par exemple, Joni Mitchell sur Sex kills.

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