mardi 13 novembre 2012

C'est bon de rire parfois

C'est compliqué de rire avec la chanson. Je veux dire par là que si les chansons sont souvent le reflet de nos humeurs, on a tendance à oublier le rire, ou, du moins, le sourire dans la chanson. Ou plutôt, dès qu'il s'agit de se marrer en matière de chanson, on a tendance à traiter ça avec peu de sérieux : au mieux, on pense à Annie Cordy ou Henri Salvador, au pire, à Patrick Sébastien. Et c'est assez triste comme géographie sonore du rire : c'est comme s'il n'existait que les films de Claude Zidi ou la série des Sous Doués, et qu'on faisait une croix sur tout le reste, c'est à dire toutes les sortes d'humour un peu plus haut de gamme qui vont, en ce qui me concerne, des Monty Python aux Nuls, en passant par Absolutely Fabulous, j'en passe et bien d'autres. Une chanson drôle n'est pas forcément une parodie. Et si elle l'est, là encore, elle doit être faite avec le plus grand sérieux. Par exemple, je n'ai pas l'impression que les Inconnus parodiant Indochine, ce soit totalement réussi ; d'accord, ils ont l'attitude mais ils considèrent la musique comme accessoire et délivrent un truc vite fait au Bontempi, assez cheap. C'est toute la différence avec Flight of the Conchords. Je conseille à ceux qui ne connaissent pas ce duo néozélandais le visionnage de leur série éponyme qui montre les hauts et les bas (mais surtout les bas, voire les très bas) d'un groupe de musique néozélandais cherchant à faire carrière aux Etats Unis. Et tout est matière à chanson. Les paroles sont hilarantes mais la musique n'est pas négligée. Pour tous les non anglophones, j'ai choisi la chanson avec laquelle vous aurez le moins de soucis de compréhension : Fou de fa fa, soit une chanson française easy listening, qui, vous allez l'entendre, se tient musicalement.



Pour changer du domaine de la parodie, il y a certains artistes qui ont besoin de passer par le vecteur rire pour communiquer ce qu'ils sont ou ce qu'ils ont à dire ; c'est pas parce qu'on est chanteur qu'on ne doit qu'aborder les bleus au coeur et à l'âme. Je suis peut-être sensible à une chanson drôle de qualité parce que j'ai été bercé des chansons de Boby Lapointe. Quand on écoute Saucisson de cheval, la chanson n'a rien à envier à d'autres de la même époque signées Nino Ferrer.



Il y a quelques années, j'ai trouvé qu'il y avait comme de la filiation entre Boby Lapointe et Gérald Genty. Je suis quand même nettement plus sensible à la musique de Genty et si Le lapin dit si marche aussi bien, ce n'est pas seulement à cause du texte et de ses jeux de mots un peu cons (dans le registre "plus c'est con, plus c'est bon" - ses albums s'appellent Humble héros ou Le plus grand chanteur de tout l'étang) mais bien parce qu'il s'appuie sur une très bonne mélodie très bien arrangée.



Après tout le rire est aussi une émotion qui mérite sa complainte. Et qui dit que si on ne fait pas plus de chansons drôles, de chansons drôles de qualité en tout cas, c'est tout simplement parce qu'elles sont les plus difficiles à écrire et qu'elles demandent un talent rare ? Je serais tenté de le penser concernant Clarika qui est sans aucun doute l'un des plus grands auteurs que nous ayons en France. Ca m'amuse de voir, d'ailleurs, comment pour son dernier album, la critique de Telerama mettait en avant une chanson avec un texte émouvant ; c'est un peu comme lorsqu'on reconnaît le talent d'un acteur comique quand celui-ci aborde un rôle plus dramatique. Moi en mieux, qui donnait son nom à l'album, mérite tout autant, voire plus. Et puis Clarika a un rire que j'aime beaucoup : un rire qui se mélange aux larmes. Dans Moi en mieux, même si le portrait est drôle, il s'en dégage aussi comme une certaine mélancolie.



Mais bon tout ça ne vous fera pas forcément rire ou sourire, le rire n'est pas du tout fédérateur, m'a-t-on répété un milliard de fois. Tout simplement parce qu'on ne rit pas des mêmes choses. Alors vous, vous faites comme vous voulez mais moi, Christina d'Anaïs, ça me fait toujours bien marrer.

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