La fuite a eu lieu avant hier : le nouveau Daft Punk a fuité sur le Net. Oui, z'allez me dire que ça a un goût de déjà vu, ce post si vous avez déjà lu le dernier. Et vous aurez raison puisque je vais revenir cinq minutes sur les raisons qui me font tant aimer l'album de Little Boots, sur lesquelles je ne me suis, à mon gout, pas assez expliqué. Daft Punk d'abord, puisque les deux, comme je vais m'efforcer de le démontrer, sont étroitement liés, pas seulement, mais en partie à cause de leur sorties concomitantes. Si le nouveau Daft Punk a fuité sur le Net, il n'aura qu'enrayer d'un grain de sable le plan de com' éminemment stratège du duo robotique puisque, quelques heures seulement après la fuite, on pouvait écouter intégralement l'album avant sa sortie officielle la semaine prochaine. Autant dire que c'est comme si on l'avait en même temps que la fuite puisque, comme on l'entend beaucoup ces jours-ci, on ne possède plus réellement de la musique ; on possède le droit d'y avoir accès. Je trouve ça assez triste. Peut-être des réminiscences du temps où j'étais ado et où je rêvais de posséder tel ou tel disque. C'est triste, de toutes façons, si l'on pense en termes d'héritage. Qui va trouver, parcourir votre discothèque, quand, précisément, il n'y en aura plus, ou qu'elle sera la même, globale, pour tout le monde ? D'autant que, ne vous y trompez pas, tout n'est pas accessible sur le Net ; j'ai dans ma discothèque, numérisée s'entend, nombre de morceaux qu'on ne trouve pas en libre écoute ni même à l'achat sur les plateformes du Web. Mais bon, puisque posséder n'est plus d'actualité en matière de musique, mettons simplement que, depuis hier, tout le monde a accès au nouveau Daft Punk.
Un événement avant même de l'avoir écouté. Parce que la campagne de lancement du quatrième album des français, aujourd'hui global superstars, a été pensée jusque dans les moindres détails pour arriver à cette conclusion : c'est un événement. D'ailleurs, l'album affiche d'emblée l'ambition d'être un album qui fera date. Pas seulement en passant en revue (via la série de petits films The collaborators) les prestigieux noms associés à ce nouveau chapitre (Giorgio Moroder, Nile Rodgers, Todd Edwards, Pharell Williams, Panda Bear...), mais aussi, mais surtout, par l'ambition déployée sur chacun des morceaux. Les Daft Punk veulent faire un grand album et vont enchaîner les morceaux de bravoure. Au début, on peut trouver ça facile, voire irritant (l'utilisation du vocoder non stop sur les premiers morceaux) mais force est de constater qu'à la fin, vous vous dites "Ah oui, quand même !". Disons que ça démarre vraiment au troisième morceau, Giorgio by Moroder (très bel hommage au compositeur du même nom en forme de variation réminiscente du thème de Midnight Express, The chase), ce qui n'est pas si mal puisqu'il en reste dix derrière où le rythme ne faiblira pas ou du moins, les morceaux de bravoure donc s'enchaineront tant et tant qu'ils feront oublier les faiblesses du disque. Lose yourself to dance, l'autre morceau chanté par Pharell Williams, est une tuerie funk au beat lourd (à mon avis bien supérieur à l'actuel single) qui promet un nouveau tube. Et à partir du 7ème morceau, juste derrière, Touch, hommage cette fois à Phantom of the Paradise, j'ai eu l'impression à chaque fois qu'il allait s'agir du dernier morceau tant chaque morceau, précisément, veut impressionner. Il y a une progression dans Touch, ajout de cordes, de choeurs, assez céleste et impeccablement et brutalement interrompue, ce qui laisse une sensation très chouette de coïtus interruptus en quelque sorte. Bon, après il y a donc Get lucky, qui, malgré toutes mes réserves, est déjà devenu un classique. Ce n'est pas encore une fois que ce soit un mauvais morceau, c'est juste un morceau de Chic, ce qui, entendons nous bien, est la grande classe. Sauf que, précisément, dans la discographie de Chic, il y a les morceaux de première division et ceux de la seconde, et j'ai tendance à penser (mais peut-être le temps me le fera-t-il apparaître différemment) que Get Lucky fait plutôt partie de la seconde catégorie. Beyond, malgré un début en fanfare (et orcherstre), est plutôt mineur mais sera vite effacé par l'effet majestueux que laisse Motherboard et sa mélodie au clavecin qui semble apparaître depuis l'espace. D'ailleurs, c'est souvent l'impression qu'on a dans le disque : que tout ça a été composée depuis une fusée, que la musique, clairement inspirée des seventies, n'était qu'un écho collecté des années plus tard, depuis l'espace, par des robots en quelque sorte. Fragments of time, ballade écho donc aux Doobie Brothers, est encore un passage mineur mais immédiatement éclipsée là-encore par Doin' it right, qui est une autre tuerie au beat lent sacrément entêtant. Et l'album de se clore sur Contact en forme de bouquet d'artifices. Non, non, grand album, y a pas à dire.
Sauf... Sauf que on sent que tout a été fait pour qu'on en arrive à cette conclusion, façon "attention, les petits gars, vous allez voir ce que vous allez voir" ou "vous avez vu comment qu'on joue bien" : le brio, la virtuosité, la maestria, ce dernier mot me plaisant plus que les deux autres, car sa sonorité m'évoque le mot "montrer". Ou démontrer qu'on est les plus forts. Et qu'on s'inscrit, dans le registre de la musique dance, dans ce qu'il y a de plus fort : le disco des années 70, qui, après avoir été tant décrié à sa création, a gagné, avec le temps ses lettres de noblesse.
C'est précisément ce que n'ont pas encore gagné d'autres morceaux de la musique dance. Des morceaux ultérieurs, qui partagent avec leurs illustres prédécesseurs, la même légèreté, la même instantanéité, la même insouciance, la même facilité. Autant de qualités qu'on peut qualifier de faiblesses à moins... A moins que le temps soit passé. Or c'est précisément à ces classiques en devenir que se réfère Little Boots. Des trucs que j'avais qualifiés ici même de "trucs aussi totalement inconséquents que totalement indispensables". Un peu vite sans doute puisque m'y voilà revenu. Car si j'ai donné quelques clés, je me rends compte que la plupart ne s'y trouvent pas vraiment. Alors voici quelques exemples de ces "trucs" dans la lignée desquels s'inscrivent les morceaux de Little Boots. Prenons les morceaux dans l'ordre : Motorway, l'ouverture, me fait penser à It's a fine day d'Opus III
Me fait pense par exemple aurais-je du préciser. Car, oui, ce n'est pas une référence directe mais c'est ce "genre" de morceau. Ce qui me fait d'ailleurs changer carrément mon fusil d'épaule et plutôt que d'évoquer les morceaux un par un, passons en revue les fantômes que j'ai vu passer à un moment ou l'autre de ce disque. Soit donc le People hold on de Coldcut qui avait révélé Lisa Stansfield.
Sophie Ellis Bextor du temps de sa gloire, soit le temps de son single phare, Murder on the dancefloor.
Eight Wonder, tube écrit par des Pet Shop Boys au sommet de leur forme, pour la starlette Patsy Kensit.
Olive, dont vous ne vous souvenez sans doute pas le nom, pensant sans doute à l'huile, ricanants que vous êtes, alors que vous avez sans doute conservé en mémoire leur You're not alone, qui, au passage, fait partie d'un album sublime que j'ai usé jusqu'à la corde.
Le Don't stop moving de Livin Joy auquel j'aurais tout aussi bien pu préférer son frère jumeau et aussi gros tube, Dreamer.
Des moins connus aussi - en tout cas, en France - comme le Chewing gum d'Annie.
Et puis tiens encore, le Week-end de Michael Gray.
Encore que pour ce dernier, pour tout vous dire, j'ai beaucoup hésité me disant que ça ne venait pas franchement appuyer ma démonstration. Ben oui, vous avez sans doute constaté que tous les autres morceaux sont des morceaux signés par des filles. Mais bon, la chanson est chanté par des filles et la vidéo est pleine de filles se trémoussant, illustrant à la perfection mon concept de "chansons de pouf" ici démontré et dans lequel j'avais posté le fabuleux Dove de Moony que j'aurais aussi pu évoquer ici. Et les filles, c'est pas à se la jouer gros bras, histoire précisément de voir qui a la plus grosse. Et pendant que les garçons expertiseront pendant des heures les qualités et défauts du dernier Daft Punk, jugeront de tel riff de guitares ou tel filtre sur cette partie de synthé, les filles iront danser. Et m'est avis qu'elles iront plutôt danser sur ce genre de titres. Alors évidemment, si vous êtes arrivés jusque là, plus consterné à chaque fois que vous appuyiez sur PLAY sur les vidéos que j'ai posté, pensant "Mais qu'est-ce que c'est que cette daube?!" (et il y en aura), inutile d'aller jeter une oreille à l'album de Little Boots. Allez vous prendre la tête sur le Daft Punk. Aux autres à qui ces morceaux ont envoyé des vagues dans le corps si puissantes que vous n'avez pu vous empêcher de taper du pied, voire de vous lever, hystérique, oubliant l'écran le temps de vous improviser John Travolta de salon, vous reprendrez bien un peu de Little Boots ? Et tant qu'à faire, je le répète, prenez l'album.
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