mardi 7 mai 2013

Ca sent l'été

"Ca sent l'été" : voilà comment désannonçait une animatrice d'Europe 1 à l'issue de la diffusion du nouveau titre de Daft Punk. Comme si, à l'approche des beaux jours, nous n'avions tous plus qu'une seule envie : bouger notre corps. Car c'est bien de cela qu'il s'agit, s'abandonner à la danse, et par là même, abandonner, un temps, nos soucis et l'hiver. J'ai d'autant plus reçu le message cinq sur cinq, que, moi même, depuis quelques jours, me gave d'albums qui font, au moins, taper du pied, au mieux, sauter en l'air de tous côtés. Mais s'il en est de très agréables, il en est un qui m'a collé une baffe à laquelle je ne m'attendais absolument pas.
Prenons les agréables d'abord : Hypnolove est un trio toulousain d'électro, semble-t-il très apprécié lors des derniers défilés de mode à Paris (hype, baby, hype), qui vient de sortir son premier album, un peu faiblard sur la fin, mais dont les six premiers morceaux (et c'est déjà beaucoup) valent largement le coup et qui, pour le coup, est totalement dans le sujet avec son Holiday reverie.



!!! (prononcez chk chk chk, enfin si vous y arrivez) est un groupe américain qui en est à son énième album mais je trouve celui-ci particulièrement intéressant dans son aptitude à nous faire bouger, ambition clairement affiché dans le titre de l'album, clin d'oeil à Michael Jackson, et dorénavant l'un des meilleurs titres de l'année : Thr!!!er dont est extrait le One girl / One boy ci-dessous.



Toujours outre atlantique, le duo Classixx vient de pondre avec Hanging gardens un album de house assez classieuse avec plein de références aux années 80 (le morceau titre, par exemple, boucle de manière somptueuse l'intro du Seven wonders de Fleetwood Mac) où, là encore, on peut piocher de quoi danser all night long comme avec Holding on.



Mais si tous ces albums sont éminemment recommandables (et d'ailleurs, donc, recommandés), rien ne me préparait à ce qui suit: soit donc un album que j'avais téléchargé comme ça, un peu par hasard, parce que j'avais lu quelque part, sans doute, le nom de son auteur : Little Boots. Depuis, j'ai évidemment cherché pourquoi ce nom me disait quelque chose ; en 2009, la dénommée Little Boots a gagné le prestigieux titre Sound of 2009 remis par les auditeurs de la BBC aux artistes les plus prometteurs, devançant dans le classement, cette année-là, Florence + the Machine, LaRoux, Lady Gaga ou Empire of the Sun. Est-ce parce que trop d'espoirs reposaient sur les frêles épaules de cette demoiselle, toujours est-il qu'elle fit, au final, beaucoup moins de bruit que ses compétiteurs. Et si le Sound of 2009 était en fait celui de 2013 ? Du moins pas tout à fait : j'ai aussi été écouté ce qu'avait fait Little Boots il y a quatre ans (vous vous souviendrez peut-être de New in town) et, comment dire, euh, c'est... bof. De la pop assez insipide, passe partout, à ne pas comprendre pourquoi on avait tant misé sur Little Boots. Or, voici comment la chose se passa : j'enclenchais le mode lecture sur Nocturnes, le nouvel album tout en faisant le ménage à la maison. Autant dire en musique de fond. Mais la musique est venue me chercher, de titres en titres, petit à petit. Hésitant au début (c'est vraiment bien ou c'est juste qu'il fait beau ?), je rendais définitivement les armes au cinquième morceau, l'instant classic Beat Beat. Beat Beat est, à mon avis, exactement le type de morceau que cherchait à créer Daft Punk avec Get Lucky, soit non pas un morceau qui regorge de sample de ces vieux tubes disco et funk qui nous ont tant fait danser, mais le vieux tube disco funk lui même, comme si, après avoir écrit tant de morceaux à partir de samples, Daft Punk cherchait maintenant à écrire un morceau fait pour être samplé (on ne compte d'ailleurs déjà plus le nombre de musiciens amateurs ayant samplé la petite guitare funky du Get lucky). Mais le Beat beat de Little Boots est un chouia supérieur au Get lucky, en ce sens qu'il réveille toute une série de vieux classiques auxquels il s'apparente immédiatement comme le To be real de Cheryl Lynn.



D'ailleurs, c'est la principale qualité de l'album de Little Boots : convoquer le meilleur des musiques de dance (ça s'appelle pas Nocturnes pour rien), des trucs aussi totalement inconséquents que totalement indispensables allant de Kylie Minogue à Crystal Waters, en passant par Madonna, Robyn ou St Etienne, le meilleur de la musique de pouf déjà évoquée ici, mêlant funk, disco, house, trance, avec la boule à facette comme seul cap, servi par le Who's who de la dance music (aller cliquer sur chacun des co-compositeurs de son album sur la page Wikipedia de l'album et vous verrez qu'il y a de quoi être impressionné) mais avec une vraie cohérence. Il faut dire que l'album est produit par une seule et même personne, Tim Goldsworthy, une pointure, et que Little Boots a, ces dernières années, beaucoup fait le DJ et ça se sent : les morceaux s'enchaînent impeccablement du début à la fin. Je peux comprendre que tout le monde ne soit pas sensible au truc (j'ai déjà lu de très mauvaises critiques), la voix un rien gnangnan, des gimmicks qu'on peut trouver simples, des beats déjà entendus... Autant de trucs que je me suis d'abord dits, mais à un moment faut savoir dire stop, céder au charme de sa voix sucrée, crier à tue-tête les "la-la-la-la" de Confusion et autres "Everybody shake / Till your heart break" de Shake, constater comme ces beats sont extrêmement judicieusement choisis. Alors vous tiendrez l'un des meilleurs disques pop de l'année ; c'est pas moi qui le dit mais le très respectable The Guardian. Le seul souci, c'est comment j'illustre ça parce que, vous l'aurez compris, c'est l'album qui vous cueillera. Alors voilà ce qu'on va faire, on va mettre Every night I say a prayer ci-dessous, et on va espérer (prier conviendra mieux à l'esprit de la chanson) que les "Oh oh Oh" de la chanson vous guideront vers le plaisir purement hédoniste de l'album, ou, mieux, que vous vous dirigiez directement vers l'écoute de l'album dans son intégralité sans passer par la case vidéo. Vous n'y gagnerez peut-être pas 20000 francs, mais l'assurance d'un très bon moment, comme la promesse d'un bel été.

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