vendredi 31 mai 2013

Un pas en avant, trois en arrière

Deux semaines que je ne suis pas revenu sur ces pages et j'ai l'impression que mille ans se sont écoulés. Peut-être parce que, printemps oblige, j'accumule en ce moment les albums et autres titres piochés à droite à gauche, voire même pas intégrés à ma discothèque mais qui résonnent encore dans ma tête. La dernière catégorie ne contient qu'un représentant mais ô combien important puisqu'il est clair, d'après moi, que Benjamin Clementine va faire le buzz. Parce que ce jeune black anglais a été découvert dans le métro (ce n'est pas une première mais ça marche toujours - d'ailleurs on a tous, je crois, eu, un jour ou l'autre, une émotion forte au détour d'un couloir de métro, enfin peut-être pas vous, mais moi, oui, mais je vais refermer la parenthèse) et parce que sa chanson dédié à London a quelque chose d'un hymne dépouillé à la ville, qui serait une espèce de version d'outre Atlantique, low cost et cafardeuse car, forcément, plongée dans le brouillard, de ce que l'Empire State of mind de Jay Z et Alicia Keys fut pour New York. Au pire, si sa chanson ne traverse pas la Manche (ce fut le cas, par exemple, du Say it ain't so Joe de Murray Head, standard chez nous et que dalle chez les Grands Bretons), sa scansion bluesy devrait frapper assez d'esprits ici (elle est déjà dans la play-list de France Inter) pour lui assurer des fins de mois définitivement loin des couloirs de la RATP.


Benjamin Clementine - London / Le Carmen from Irudia on Vimeo.

Mais vous savez quoi ? Malgré l'évident talent du bonhomme et la réussite de cette chanson, ça me fatigue déjà. Parce qu'on va l'entendre un demi milliard de fois et qu'à chaque fois, précisément comme je viens de le faire, on nous rappellera qu'il sort du métro, que c'est un conte de fées, etc... Un buzz un peu trop évident. Mais buzz quand même.
Jesse Ware a énormément buzzé l'année dernière avec son premier album. Ca aurait pu me plaire. Sauf que ça l'a pas fait. Or la même Jesse a sorti ces jours-ci à l'occasion de la sortie, je crois, de son disque aux Etats Unis, l'incroyable Imagine it was us, qui est un tube plus-efficace-tu-meurs dont je ne me peux me défaire. De quoi, peut-être, me refaire une opinion sur l'album ou, tout du moins, guetter ses prochaines sorties.



D'autant que Jessie Ware est allé poser sa voix sur la sucrerie soul diablement efficace et totalement ensoleillée de Mayer Hawthorne, Her favorite song, qu'on garde pour les ballades en voiture, décapotée de préférence, cet été avant d'aller à la plage.



J'ai déjà dit ici comme j'aimais la musique africaine quand elle s'associait à d'autres sonorités. C'est précisément ce que j'adore dans le Djon Maya de Victor Démé remixé par Synapson dont vous auriez d'autant plus de tort de vous passer qu'il est téléchargeable à l'heure où j'écris ces lignes.



C'est rigolo parce qu'en le réécoutant à l'instant, y a un petit côté africanisant dans la bluette de l'anglais Bibio qui permet d'avoir un air (qui ne vous quittera plus) pour dire (ou plutôt chanter donc) A tout à l'heure ! (Là encore téléchargeable contre une adresse mail, toujours à l'heure où j'écris ces lignes)



Vu la qualité des deux premiers morceaux que j'ai entendu, j'attends avec impatience Impersonator, l'album des Canadiens de Majical Cloudz. Jugez en par l'atmosphère impressionnante de Bugs dont buzz, là encore téléchargeable à l'heure où...



Amoureux de ces ambiances sombres, ne manquez pas le dernier Tricky, False Idols. Je le dis d'autant plus volontiers que je n'ai pas été très fan de tout ce qu'a fait Tricky après son inaugural et sans doute insurpassable Maxinquaye, maître étalon du trip hop. Or il y a une chanson sur le dernier album qui s'appelle Nothing's changed. Et effectivement, Tricky fait comme si rien n'avait changé depuis son premier album. Perso, vous m'en voyez ravi. Après, j'imagine que plus d'un vont l'accuser de faire du surplace, mais ce re-départ (il vient de changer de maison de disques) est à mon goût très convaincant et, vous me direz merci plus tard, téléchargeable en ce qui concerne le morceau ci-dessous à condition d'une adresse email.



Ca vous a plu, petits morbides que vous êtes ? Alors ce serait dommage de se priver de la reprise la plus déprimante et donc sans doute la plus jouissive du Get lucky des Daft Punk par les anglais de Daughter qui, en l’occurrence, ont du rendre bien jaloux the XX (et oui, c'est encore téléchargeable).



Mais pour ceux qui me reprocheraient déjà mon humeur chagrine, je peux aussi proposer une version du même titre survitaminée, mash up gavée de samples en tous genre (Madonna, Michael Jackson, Chic, Justin Timberlake, Neneh Cherry et même Rick Astley !) réalisée en Grèce par Robin Skouteris et qui, pour ma part, est sur ma play-list de boums cet été (et oui, c'est encore téléchargeable).


Je pensais pas écrire un jour super groove mais bon que voulez-vous que je vous dise de Heartbreaks + Seatbacks de Thundercat à part qu'il a un super groove ? Qu'il a un super vibe ? Mouais... Vous m'aurez compris (album à venir début juillet).



En fait, j'écoute tellement de trucs en ce moment que je télécharge des morceaux juste pour me souvenir (le morceau étant tellement engageant) qu'il ne faut pas que j'oublie de prendre l'album au moment de sa sortie. Sauf qu'évidemment, la faute aux "tellement de trucs que j'écoute en ce moment", j'oublie. C'est à l'instant, par exemple, que je me rends compte que je n'ai pas encore écouté Dormarion, l'album de l'américain Telekinesis, dont je suis, pour le coup, bien incapable de vous parler, alors que je ne me suis toujours pas lassé de son single avant coureur Ghosts and creatures.



Il faut en général se méfier des concepts aussi fumeux que foireux du style deux pianistes de formation classique qui jouent avec un batteur une musique à consonance électronique. Sauf qu'avec Aufgang, ça marche. L'album est très très réussi.



Je pourrais aussi vous dire, mais à quoi bon, que l'album de Vampire Weekend est un super album. Oui, à quoi bon, car si vous ouvrez un journal ces jours-ci, vous y lirez exactement la même chose et, pour moi, à raison. A vrai dire, je n'avais jamais réellement adhéré à la musique de Vampire Weekend jusqu'à présent ; les petites guitares façon l'Afrique du Sud revues par Paul Simon, c'était pas pour moi. Or je me suis pris une sacrée claque avec Diane Young, leur rockabilly revisité (moi, qui pourtant déteste le rockabilly) et m'en suis pris plusieurs autres derrière via donc l'album Modern Vampires of the City, d'ores et déjà l'un des meilleurs de l'année.



Je pourrais aussi vous dire que l'album de Phoenix n'est pas réussi. Mais à quoi bon ? Et là, ce n'est pas parce que vous l'aurez lu quelque part, mais simplement parce qu'il était carrément impossible de trouver un successeur à la hauteur de Wolfgang Amadeus Phoenix. Pourtant l'intention était bonne avec le compas braqué sur le son des eighties, sauf que tout est lourd et pataud. Je ne crois même pas que ce soit une question de composition mais bien plus de production et pour s'en convaincre, il suffit de jeter une oreille au remix par RAC (dont, il est vrai, les remixes sont presque toujours excellents) de Trying to be cool, qui fait enfin de ce morceau, quelque chose, précisément, de cool (et, c'est cool aussi, téléchargeable).



D'ailleurs, pour en terminer sur le chapitre Phoenix, je trouve que la même intention se retrouve sur l'album de Chateau Marmont, The Maze, mais de manière autrement mieux exécutée. A vrai dire, j'ai retrouvé sur cet album, la même ambition (70's et 80's revisités) que sur le dernier Daft Punk et la même réussite aussi, mais en moins flamboyant, en moins m'as-tu-vu. Un peu la version low cost et petit bras (et dont on parlera donc sans doute nettement moins) du Random Access Memories.



Oui, je pourrais vous parler de tout ça. Sauf que j'ai beau m'efforcer à suivre le carnet des tendances de la saison, et d'y trouver parfois de quoi me satisfaire, je finis, à la fin de la journée, par me retrouver sur un blog intitulé Newromanticrules, où rien ne m'a fait plus plaisir que de retomber sur l'album The big heat de Stan Ridgway (j'en entends certains faire "qui !?"), l'ex chanteur de Wall of Voodoo (encore : "Qui !?"), que j'avais tant écouté en 1985, et que j'ai encore en vynile. Il chante encore, Stan Ridgway. Il a fait un album tous les 3, 4 ans depuis The big heat. Et quand on écoute le morceau titre ou Camouflage ou Salesman ou Drive she said, on se demande pourquoi on a arrêté d'écouter Stan Ridgway. On se demande à quoi ça sert d'écouter tout le reste quand on a déjà ça. Ca sert à rien. Juste à faire plaisir.



Allez, levons notre coude à demain, à hier, et à dans deux semaines ou dans mille ans !

mercredi 15 mai 2013

Deux cas dance

La fuite a eu lieu avant hier : le nouveau Daft Punk a fuité sur le Net. Oui, z'allez me dire que ça a un goût de déjà vu, ce post si vous avez déjà lu le dernier. Et vous aurez raison puisque je vais revenir cinq minutes sur les raisons qui me font tant aimer l'album de Little Boots, sur lesquelles je ne me suis, à mon gout, pas assez expliqué. Daft Punk d'abord, puisque les deux, comme je vais m'efforcer de le démontrer, sont étroitement liés, pas seulement, mais en partie à cause de leur sorties concomitantes. Si le nouveau Daft Punk a fuité sur le Net, il n'aura qu'enrayer d'un grain de sable le plan de com' éminemment stratège du duo robotique puisque, quelques heures seulement après la fuite, on pouvait écouter intégralement l'album avant sa sortie officielle la semaine prochaine. Autant dire que c'est comme si on l'avait en même temps que la fuite puisque, comme on l'entend beaucoup ces jours-ci, on ne possède plus réellement de la musique ; on possède le droit d'y avoir accès. Je trouve ça assez triste. Peut-être des réminiscences du temps où j'étais ado et où je rêvais de posséder tel ou tel disque. C'est triste, de toutes façons, si l'on pense en termes d'héritage. Qui va trouver, parcourir votre discothèque, quand, précisément, il n'y en aura plus, ou qu'elle sera la même, globale, pour tout le monde ? D'autant que, ne vous y trompez pas, tout n'est pas accessible sur le Net ; j'ai dans ma discothèque, numérisée s'entend, nombre de morceaux qu'on ne trouve pas en libre écoute ni même à l'achat sur les plateformes du Web. Mais bon, puisque posséder n'est plus d'actualité en matière de musique, mettons simplement que, depuis hier, tout le monde a accès au nouveau Daft Punk.
Un événement avant même de l'avoir écouté. Parce que la campagne de lancement du quatrième album des français, aujourd'hui global superstars, a été pensée jusque dans les moindres détails pour arriver à cette conclusion : c'est un événement. D'ailleurs, l'album affiche d'emblée l'ambition d'être un album qui fera date. Pas seulement en passant en revue (via la série de petits films The collaborators) les prestigieux noms associés à ce nouveau chapitre (Giorgio Moroder, Nile Rodgers, Todd Edwards, Pharell Williams, Panda Bear...), mais aussi, mais surtout, par l'ambition déployée sur chacun des morceaux. Les Daft Punk veulent faire un grand album et vont enchaîner les morceaux de bravoure. Au début, on peut trouver ça facile, voire irritant (l'utilisation du vocoder non stop sur les premiers morceaux) mais force est de constater qu'à la fin, vous vous dites "Ah oui, quand même !". Disons que ça démarre vraiment au troisième morceau, Giorgio by Moroder (très bel hommage au compositeur du même nom en forme de variation réminiscente du thème de Midnight Express, The chase), ce qui n'est pas si mal puisqu'il en reste dix derrière où le rythme ne faiblira pas ou du moins, les morceaux de bravoure donc s'enchaineront tant et tant qu'ils feront oublier les faiblesses du disque. Lose yourself to dance, l'autre morceau chanté par Pharell Williams, est une tuerie funk au beat lourd (à mon avis bien supérieur à l'actuel single) qui promet un nouveau tube. Et à partir du 7ème morceau, juste derrière, Touch, hommage cette fois à Phantom of the Paradise, j'ai eu l'impression à chaque fois qu'il allait s'agir du dernier morceau tant chaque morceau, précisément, veut impressionner. Il y a une progression dans Touch, ajout de cordes, de choeurs, assez céleste et impeccablement et brutalement interrompue, ce qui laisse une sensation très chouette de coïtus interruptus en quelque sorte. Bon, après il y a donc Get lucky, qui, malgré toutes mes réserves, est déjà devenu un classique. Ce n'est pas encore une fois que ce soit un mauvais morceau, c'est juste un morceau de Chic, ce qui, entendons nous bien, est la grande classe. Sauf que, précisément, dans la discographie de Chic, il y a les morceaux de première division et ceux de la seconde, et j'ai tendance à penser (mais peut-être le temps me le fera-t-il apparaître différemment) que Get Lucky fait plutôt partie de la seconde catégorie. Beyond, malgré un début en fanfare (et orcherstre), est plutôt mineur mais sera vite effacé par l'effet majestueux que laisse Motherboard et sa mélodie au clavecin qui semble apparaître depuis l'espace. D'ailleurs, c'est souvent l'impression qu'on a dans le disque : que tout ça a été composée depuis une fusée, que la musique, clairement inspirée des seventies, n'était qu'un écho collecté des années plus tard, depuis l'espace, par des robots en quelque sorte. Fragments of time, ballade écho donc aux Doobie Brothers, est encore un passage mineur mais immédiatement éclipsée là-encore par Doin' it right, qui est une autre tuerie au beat lent sacrément entêtant. Et l'album de se clore sur Contact en forme de bouquet d'artifices. Non, non, grand album, y a pas à dire.
Sauf... Sauf que on sent que tout a été fait pour qu'on en arrive à cette conclusion, façon "attention, les petits gars, vous allez voir ce que vous allez voir" ou "vous avez vu comment qu'on joue bien" : le brio, la virtuosité, la maestria, ce dernier mot me plaisant plus que les deux autres, car sa sonorité m'évoque le mot "montrer". Ou démontrer qu'on est les plus forts. Et qu'on s'inscrit, dans le registre de la musique dance, dans ce qu'il y a de plus fort : le disco des années 70, qui, après avoir été tant décrié à sa création, a gagné, avec le temps ses lettres de noblesse.
C'est précisément ce que n'ont pas encore gagné d'autres morceaux de la musique dance. Des morceaux ultérieurs, qui partagent avec leurs illustres prédécesseurs, la même légèreté, la même instantanéité, la même insouciance, la même facilité. Autant de qualités qu'on peut qualifier de faiblesses à moins... A moins que le temps soit passé. Or c'est précisément à ces classiques en devenir que se réfère Little Boots. Des trucs que j'avais qualifiés ici même de "trucs aussi totalement inconséquents que totalement indispensables". Un peu vite sans doute puisque m'y voilà revenu. Car si j'ai donné quelques clés, je me rends compte que la plupart ne s'y trouvent pas vraiment. Alors voici quelques exemples de ces "trucs" dans la lignée desquels s'inscrivent les morceaux de Little Boots. Prenons les morceaux dans l'ordre : Motorway, l'ouverture, me fait penser à It's a fine day d'Opus III



Me fait pense par exemple aurais-je du préciser. Car, oui, ce n'est pas une référence directe mais c'est ce "genre" de morceau. Ce qui me fait d'ailleurs changer carrément mon fusil d'épaule et plutôt que d'évoquer les morceaux un par un, passons en revue les fantômes que j'ai vu passer à un moment ou l'autre de ce disque. Soit donc le People hold on de Coldcut qui avait révélé Lisa Stansfield.



Sophie Ellis Bextor du temps de sa gloire, soit le temps de son single phare, Murder on the dancefloor. 



Eight Wonder, tube écrit par des Pet Shop Boys au sommet de leur forme, pour la starlette Patsy Kensit.



Olive, dont vous ne vous souvenez sans doute pas le nom, pensant sans doute à l'huile, ricanants que vous êtes, alors que vous avez sans doute conservé en mémoire leur You're not alone, qui, au passage, fait partie d'un album sublime que j'ai usé jusqu'à la corde.



Le Don't stop moving de Livin Joy auquel j'aurais tout aussi bien pu préférer son frère jumeau et aussi gros tube, Dreamer.



Des moins connus aussi - en tout cas, en France - comme le Chewing gum d'Annie.



Et puis tiens encore, le Week-end de Michael Gray.



Encore que pour ce dernier, pour tout vous dire, j'ai beaucoup hésité me disant que ça ne venait pas franchement appuyer ma démonstration. Ben oui, vous avez sans doute constaté que tous les autres morceaux sont des morceaux signés par des filles. Mais bon, la chanson est chanté par des filles et la vidéo est pleine de filles se trémoussant, illustrant à la perfection mon concept de "chansons de pouf" ici démontré et dans lequel j'avais posté le fabuleux Dove de Moony que j'aurais aussi pu évoquer ici. Et les filles, c'est pas à se la jouer gros bras, histoire précisément de voir qui a la plus grosse. Et pendant que les garçons expertiseront pendant des heures les qualités et défauts du dernier Daft Punk, jugeront de tel riff de guitares ou tel filtre sur cette partie de synthé, les filles iront danser. Et m'est avis qu'elles iront plutôt danser sur ce genre de titres. Alors évidemment, si vous êtes arrivés jusque là, plus consterné à chaque fois que vous appuyiez sur PLAY sur les vidéos que j'ai posté, pensant "Mais qu'est-ce que c'est que cette daube?!" (et il y en aura), inutile d'aller jeter une oreille à l'album de Little Boots. Allez vous prendre la tête sur le Daft Punk. Aux autres à qui ces morceaux ont envoyé des vagues dans le corps si puissantes que vous n'avez pu vous empêcher de taper du pied, voire de vous lever, hystérique, oubliant l'écran le temps de vous improviser John Travolta de salon, vous reprendrez bien un peu de Little Boots ? Et tant qu'à faire, je le répète, prenez l'album.

mardi 7 mai 2013

Ca sent l'été

"Ca sent l'été" : voilà comment désannonçait une animatrice d'Europe 1 à l'issue de la diffusion du nouveau titre de Daft Punk. Comme si, à l'approche des beaux jours, nous n'avions tous plus qu'une seule envie : bouger notre corps. Car c'est bien de cela qu'il s'agit, s'abandonner à la danse, et par là même, abandonner, un temps, nos soucis et l'hiver. J'ai d'autant plus reçu le message cinq sur cinq, que, moi même, depuis quelques jours, me gave d'albums qui font, au moins, taper du pied, au mieux, sauter en l'air de tous côtés. Mais s'il en est de très agréables, il en est un qui m'a collé une baffe à laquelle je ne m'attendais absolument pas.
Prenons les agréables d'abord : Hypnolove est un trio toulousain d'électro, semble-t-il très apprécié lors des derniers défilés de mode à Paris (hype, baby, hype), qui vient de sortir son premier album, un peu faiblard sur la fin, mais dont les six premiers morceaux (et c'est déjà beaucoup) valent largement le coup et qui, pour le coup, est totalement dans le sujet avec son Holiday reverie.



!!! (prononcez chk chk chk, enfin si vous y arrivez) est un groupe américain qui en est à son énième album mais je trouve celui-ci particulièrement intéressant dans son aptitude à nous faire bouger, ambition clairement affiché dans le titre de l'album, clin d'oeil à Michael Jackson, et dorénavant l'un des meilleurs titres de l'année : Thr!!!er dont est extrait le One girl / One boy ci-dessous.



Toujours outre atlantique, le duo Classixx vient de pondre avec Hanging gardens un album de house assez classieuse avec plein de références aux années 80 (le morceau titre, par exemple, boucle de manière somptueuse l'intro du Seven wonders de Fleetwood Mac) où, là encore, on peut piocher de quoi danser all night long comme avec Holding on.



Mais si tous ces albums sont éminemment recommandables (et d'ailleurs, donc, recommandés), rien ne me préparait à ce qui suit: soit donc un album que j'avais téléchargé comme ça, un peu par hasard, parce que j'avais lu quelque part, sans doute, le nom de son auteur : Little Boots. Depuis, j'ai évidemment cherché pourquoi ce nom me disait quelque chose ; en 2009, la dénommée Little Boots a gagné le prestigieux titre Sound of 2009 remis par les auditeurs de la BBC aux artistes les plus prometteurs, devançant dans le classement, cette année-là, Florence + the Machine, LaRoux, Lady Gaga ou Empire of the Sun. Est-ce parce que trop d'espoirs reposaient sur les frêles épaules de cette demoiselle, toujours est-il qu'elle fit, au final, beaucoup moins de bruit que ses compétiteurs. Et si le Sound of 2009 était en fait celui de 2013 ? Du moins pas tout à fait : j'ai aussi été écouté ce qu'avait fait Little Boots il y a quatre ans (vous vous souviendrez peut-être de New in town) et, comment dire, euh, c'est... bof. De la pop assez insipide, passe partout, à ne pas comprendre pourquoi on avait tant misé sur Little Boots. Or, voici comment la chose se passa : j'enclenchais le mode lecture sur Nocturnes, le nouvel album tout en faisant le ménage à la maison. Autant dire en musique de fond. Mais la musique est venue me chercher, de titres en titres, petit à petit. Hésitant au début (c'est vraiment bien ou c'est juste qu'il fait beau ?), je rendais définitivement les armes au cinquième morceau, l'instant classic Beat Beat. Beat Beat est, à mon avis, exactement le type de morceau que cherchait à créer Daft Punk avec Get Lucky, soit non pas un morceau qui regorge de sample de ces vieux tubes disco et funk qui nous ont tant fait danser, mais le vieux tube disco funk lui même, comme si, après avoir écrit tant de morceaux à partir de samples, Daft Punk cherchait maintenant à écrire un morceau fait pour être samplé (on ne compte d'ailleurs déjà plus le nombre de musiciens amateurs ayant samplé la petite guitare funky du Get lucky). Mais le Beat beat de Little Boots est un chouia supérieur au Get lucky, en ce sens qu'il réveille toute une série de vieux classiques auxquels il s'apparente immédiatement comme le To be real de Cheryl Lynn.



D'ailleurs, c'est la principale qualité de l'album de Little Boots : convoquer le meilleur des musiques de dance (ça s'appelle pas Nocturnes pour rien), des trucs aussi totalement inconséquents que totalement indispensables allant de Kylie Minogue à Crystal Waters, en passant par Madonna, Robyn ou St Etienne, le meilleur de la musique de pouf déjà évoquée ici, mêlant funk, disco, house, trance, avec la boule à facette comme seul cap, servi par le Who's who de la dance music (aller cliquer sur chacun des co-compositeurs de son album sur la page Wikipedia de l'album et vous verrez qu'il y a de quoi être impressionné) mais avec une vraie cohérence. Il faut dire que l'album est produit par une seule et même personne, Tim Goldsworthy, une pointure, et que Little Boots a, ces dernières années, beaucoup fait le DJ et ça se sent : les morceaux s'enchaînent impeccablement du début à la fin. Je peux comprendre que tout le monde ne soit pas sensible au truc (j'ai déjà lu de très mauvaises critiques), la voix un rien gnangnan, des gimmicks qu'on peut trouver simples, des beats déjà entendus... Autant de trucs que je me suis d'abord dits, mais à un moment faut savoir dire stop, céder au charme de sa voix sucrée, crier à tue-tête les "la-la-la-la" de Confusion et autres "Everybody shake / Till your heart break" de Shake, constater comme ces beats sont extrêmement judicieusement choisis. Alors vous tiendrez l'un des meilleurs disques pop de l'année ; c'est pas moi qui le dit mais le très respectable The Guardian. Le seul souci, c'est comment j'illustre ça parce que, vous l'aurez compris, c'est l'album qui vous cueillera. Alors voilà ce qu'on va faire, on va mettre Every night I say a prayer ci-dessous, et on va espérer (prier conviendra mieux à l'esprit de la chanson) que les "Oh oh Oh" de la chanson vous guideront vers le plaisir purement hédoniste de l'album, ou, mieux, que vous vous dirigiez directement vers l'écoute de l'album dans son intégralité sans passer par la case vidéo. Vous n'y gagnerez peut-être pas 20000 francs, mais l'assurance d'un très bon moment, comme la promesse d'un bel été.

samedi 4 mai 2013

Cour de récré

Depuis quelques jours, j'ai le même air qui me trotte dans la tête. J'ai beau avoir écouté, comme d'hab, un demi milliard de nouveautés, il n'y a que celle-ci qui se retienne aux parois de ma mémoire. Ca sentirait le tube que ça m'étonnerait pas. Il faut dire que la chose en question que je réserve pour la fin est chantée par des enfants. On peut fuir, ce que je comprendrais vu la pelote de nerfs que moi-même je deviens quand j'entends la bande originale des Choristes (sauf quand c'est chanté, en français soit disant, par Beyoncé où, là, ça devient drôle), mais on peut aussi se souvenir que Justice en a fait le gimmick principal de son D.A.N.C.E. comme le firent les biennommés Keedz et leur Stand on the word.



Ce qui est cool ici, c'est qu'ils ont l'air de s'amuser, les kids, et c'est précisément ça, me semble-t-il, qu'ils apportent en plus de leur innocence : un sens de la fête, de la musique comme un jeu. A ce petit jeu, précisément, j'avais beaucoup aimé l'utilisation faite des voix d'enfants par Ryan Gosling. Oui, le beau Ryan Gosling, celui là même, qui, durant ses années sur la chaîne de Mickey, montra ce qu'il peut y avoir de pire en matière d'utilisation des enfants, sut se racheter via le groupe Dead Man's Bones, qui n'a publié, à ce jour, qu'un seul album, la carrière du beau gosse semblant, c'est fort dommage, mettre un frein sur la carrière du pourtant prometteur musicien. Même un truc aussi lugubre, sur le papier, que My body's a zombie for you se révèle, du coup, un joyeux refrain.



Tout l'album de Dead Man's Bones, comme l'indiquait la pochette, était en collaboration avec le choeur d'enfants du conservatoire de Silverlake. Or c'est précisément ce même choeur qu'on retrouve sur mon coup de choeur du moment. Il est du à Mr Little Jeans, qui, comme son nom ne l'indique absolument pas, est une Norvégienne originaire des îles Fidji, qui s'était fait connaître il y a deux ans de toute la blogosphère via une reprise très décalée et très synthétique de The Suburbs d'Arcade Fire. Je parierais bien ma chemise que Oh Sailor, qui a déjà enflammé la toile, dépasse sous peu très largement les frontières du Web pour se retrouver dans tous les classements de vente de singles, d'autant que la demoiselle, en plus d'être talentueuse, est particulièrement jolie (oui, c'est vrai, la vie est injuste). En attendant ce jour où Oh sailor finira par me casser les oreilles, je célèbre, aujourd'hui, ce jour où donc ce truc, et c'est heureux, ne veut pas me sortir de l'oreille.